Au début du XXème siècle, les agriculteurs représentaient presque 50% de la population active. Aujourd’hui ce taux atteint à peine les 2%. Pour nourrir toute la population, ces agriculteurs n’ont dès lors d’autre choix que le productivisme, avec les conséquences sur la qualité et bien sûr également sur l’environnement. La France a besoin de développer le maraîchage, mais elle a surtout besoin de maraîchers responsables ! De plus, la demande est importante, la population souhaite de plus en plus consommer naturel, frais et local.
Le marché des produits biologiques est en plein essor, l’observatoire développé par l’Agence Bio le confirme tous les ans et les fruits et légumes frais font partie des premiers produits consommés en bio. Allier cette tendance à la volonté de relocalisation de la consommation et la demande ne fait que s’accroître.
Le maraîchage sans irrigation
Alors que la France est frappée par une sécheresse intense, certains maraîchers ont trouvé la solution : ils n’arrosent pas leurs légumes ! Les fortes chaleurs et le manque d’eau ne sont absolument pas un problème. A nous de comprendre comment la nature peut se développer sans eau et de l’appliquer correctement.
Si nous revenons quelques années en arrière, nos grands-parents et arrières grands parents cultivaient la terre sans engrais, sans pesticides ni même des systèmes d’irrigation. Pas de secret, pas de magie, mais du travail et du bon sens. Certains maraîchers laissent pousser les mauvaises herbes et les enfouissent dans le sol en labourant, avec l’aide des verres de terre, c’est ce qui servira d’engrais et d’eau pour l’année d’après.
Une nouvelle agriculture qui consomme peu d’énergie et régénère la structure du sol. Il est temps de changer notre mode de pratique culturale afin de préserver notre patrimoine écologique. Une association des anciennes méthodes utilisées par nos ancêtres à l’époque où l’eau n’était pas courante et les canaux d’irrigation plutôt très rares.
Maintenir l’humidité-organismes
Les micro-organismes vont aérer le sol, donc augmenter la capacité d’infiltration de l’eau. C’est « l’effet couscous ». Cette multitude silencieuse vit, meurt et transpire, conférant en plus une humidité constante dans la terre. On a tout intérêt à cultiver des micro-organismes sur son sol avant de cultiver des légumes. Compost, paillage, engrais verts apporteront et multiplieront ces derniers et faciliteront la vie du maraîcher.
· L’humus peut stocker énormément d’eau (près de 10 fois son volume), cette éponge est la réserve disponible à court et moyen terme du sol. C’est aussi pourquoi certains agriculteurs conventionnels sont obligés d’arroser tout l’été : leur sol n’a plus de matière organique. Dans de bonnes conditions de culture (paillage, non travail du sol, associations etc) l’humus est suffisamment présent. On peut en rajouter avec du compost, et du coup on rajoute aussi des micro-organismes.
· L’argile, par sa forme élémentaire en feuillets, va permettre de stocker à long terme beaucoup d’eau (gonfle quand elle est hydratée puis se rétracte en cas de sécheresse). Il est donc intéressant quand on a un sol sableux, filtrant et donc pauvre en argile d’en rajouter un peu.
La fanéoculture ou l’humidité grâce au foin
C’est une méthode agricole adaptée à la culture maraîchère, fruitière, florale et viticole sur buttes de foin avec un apport de déchets végétaux et de matières organiques animales sans modifier de quelques manières la structure du sol et de se passer totalement d’apport hydriques.
Ce type de culture peut s’adapter à tous les systèmes que ce soit l’arboriculture, la viticulture, le maraîchage, mais aussi aux cultures des services municipaux qui sont très gourmandes en eau.
A partir de septembre, l’idée est de commencer à entasser sur les anciennes cultures du foin et tous autres déchets verts sur une épaisseur de 40 cm environ. Pendant la période hivernale on ne s’en occupe pas. Il suffit juste de continuer à l’alimenter avec les déchets organiques des poules, des lapins… Pendant tout l’hiver, elles subissent l’influence du gel, de la pluie et de la neige. Ensuite, aux beaux jours on peut y ajouter les déchets de tonte, d’herbes en tout genre.
Grâce à cette méthode, nous pouvons constater que même par fortes gelées, l’intérieur de la butte de foin gardait son humidité mais permettait aussi à la faune microbienne de se nourrir et de rester présente pendant toute la saison quel que soit les conditions météorologiques. De plus, sous cette couverture de foin le sol restait meuble et ne subissait en aucun cas l’effet des grands froids.
Il est même possible de faire ses semis soi-même et de simplement écarter un peu le foin lors des transplantations. Il n’est en aucun cas nécessaire de toucher à la structure du sol, ce sont les légumes eux-mêmes qui déploient leurs racines pour s’ancrer et aller par la suite puiser les ressources nécessaires à leur développement.
Les avantages indéniables du maraîchage sans eau (ou presque)
· Sous cet épais paillage la faune du sol est beaucoup plus nombreuse et travaille en permanence sa structure en l’aérant, en sachant que le sol n’a pas été labouré.
· Le sol est en permanence humidifié même en période de fortes chaleurs.
· Il est plus aisé de commencer les cultures plus tôt car le gel n’a aucune influence sur les cultures.
· Pendant la mise en place des cultures, il n’est pas utile de désherber car cette herbe permet de conserver l’humidité et contribue par ses racines à structurer le sol. Cela n’a aucune incidence sur la pousse des légumes. De plus elles me permettent d’attirer les prédateurs ainsi que les auxiliaires et d’avoir en permanence un système complet de biodiversité.
· Aucun traitement ou engrais n’est utilisé pendant la culture.
Cultiver sans pesticides, pour un maraîchage durable
Une consommation continue d’aliments contenant des traces de pesticides chimiques peut, comme nous le savons, être un danger pour notre santé. Que l’on pratique le maraîchage biologique à grande échelle ou sur notre balcon, il est difficile de garder nos végétaux sans insectes ou maladies juste par la force de la pensée ! Voici les options disponibles pour cultiver sans pesticides et insecticides chimiques.
Les pesticides naturels du maraîchage
Les substances naturelles se dégradent plus facilement sous l’effet de la lumière, de la pluie ou de la chaleur. Elles ont ainsi moins d’effet sur notre santé et sur la nature.
· L’ortie : efficace comme insecticide naturel
· Savon noir : aide à contrôler les cochenilles, chenilles, pucerons et acariens.
· Purin d’ail : si vous avez des soucis avec la chenille du chou ou la mouche blanche, le purin d’ail sera un bon allié !
Sans pesticides : techniques complémentaires
La rotation des cultures est utilisée par les producteurs d’agriculture biologique pour préserver la santé du sol, fournir de bonnes récoltes et éviter les attaques de parasites et maladies. Comme son nom l’indique, l’objectif est que chaque famille de culture passe par toutes les différentes parties du terrain et d’éviter les répétitions.
On peut également avoir recours à la nature pour empêcher les attaques des nuisibles et les maladies. Les oiseaux, les insectes, les herbes aromatiques et même certains légumes peuvent être des moyens sûrs et sains pour protéger son potager ! Par exemple, la coriandre, le basilic et le calendula sont efficaces contre les mouches blanches. Le persil, la menthe et la citronnelle éloignent les pucerons. L’anis et la capucine sont des répulsifs naturels contre les escargots et les limaces.
Modérer les attentes
Apprendre à accepter les imperfections est un moyen de modérer ses attentes et d’accepter de manger des feuilles, certes déchiquetées, mais riches en saveur !
Résultat : des cultures plus saines… et des maraîchers qui deviennent des orfèvres en équilibres naturels.
Bons et mauvais insectes au sein du maraîchage
Pour les insectes, une solution s’impose de plus en plus : les auxiliaires. Le principe est simple : on amène sur les cultures les prédateurs des insectes que l’on veut combattre. Par exemple, la coccinelle est la plus connue, pour lutter contre les pucerons. Mais ce n’est pas forcément la plus utilisée. Il y a macrolophus (une variété de punaise), encarsia formosa (pour lutter contre la mouche blanche)… Toutes ces espèces sont vendues par des sociétés spécialisées.
Créer de l’ombrage dans votre maraîchage
L’ombrage devient incontournable dans le maraîchage, même dans des régions pourtant classées comme « fraîches ». C’est pourquoi l’idée est de créer des effets de bordures bénéfiques qui vont protéger nos légumes et multiplier nos productions.
- Par des associations : protégez du soleil vos plants fragiles en les disposant entre des légumes plus grands. Par exemple, des salades plantées ou semées au nord de légumes tels des choux, maïs, cardons vont bénéficier d’un microclimat plus frais et ombragé pour la saison estivale.
- L’effet-butte : Si vous implanté votre butte sur un axe est/ouest, vous aurez donc un côté nord frais et ombragé et un côté sud chaud et sec. Préférez le premier pour les cultures demandant de la fraîcheur l’été, et le deuxième pour les cultures hâtives au printemps et tardives en automne. On peut amplifier cet effet en plantant des légumes volumineux sur le haut de la butte.
- Plantation de haies : pour filtrer le vent, la lumière, apaiser la chaleur, amener un microclimat plus humide, de l’humus et des éléments minéraux dans le sol, des insectes auxiliaires etc. On peut varier hauteur, composition, rôle en créant par exemples des « micro-haies » à base de gros légumes, de plantes vivaces. Des haies moyennes également : arbustes, petits fruits, topinambours.
- Pour gagner du temps et de la place, il est possible de créer des ombrages temporaires. Comme les canisses, ombrières, à base de roseaux, bambous, branchages, en murs, en pergolas, tressés… Tout est question de contexte et d’imagination !
La permaculture : une réponse globale
La permaculture, c’est une démarche, une philosophie. Le but est de prendre soin de la nature, des Hommes et de partager équitablement. Autrement dit : concevoir des cultures, des lieux de vie autosuffisants et respectueux de l’environnement et des êtres vivants. C’est une éthique et beaucoup de bon sens qui s’inspirent du fonctionnement des écosystèmes et des savoir-faire traditionnels.
L’objectif principal est de protéger la nature. Mais le respect de l’environnement n’est pas incompatible avec l’abondance alimentaire. En effet, certains économistes et ONG rêvent de faire disparaître la faim dans le monde. Comment y parvenir ? Leur réponse : en répartissant harmonieusement les richesses par un partage équitable. Le monde permacole a encore du pain sur la planche ! Les permaculteurs cherchent ainsi à créer des lieux de vie autosuffisants. Ils aspirent à l’autonomie. Ils espèrent créer une profusion alimentaire et pouvoir, de cette façon, redistribuer les surplus alimentaires. On parle aussi d’agro écologie. Les deux notions sont voisines et partagent certaines techniques.
L’avenir c’est les personnes qui cherchent toujours plus loin !
Des personnes curieuses, qui se soucient de l’environnement et des conséquences que pourraient avoir une mauvaise utilisation de nos ressources, voilà les clés de l’avenir : l’Homme !
- L’aquaponie comme méthode de production : Guillaume et Thibaut se sont lancés dans la conception de fermes aquaponiques automatisées ! Plus d’explications par ici.
- Des fruits et légumes de qualité en habitant en appartement, grâce à Joséphine et son Urban Cuisine !
Conclusion
L’agriculture industrielle menace la biodiversité et la fertilité des sols. Il faut donc créer et développer des systèmes agricoles stables et résilients. Et que ce soit dans de larges espaces maraîchers ou simplement à la maison.
Il faut arrêter d’avoir un système de production formaté et être ouvert à d’autres techniques qui peuvent faire leurs preuves. Oubliez les techniques culturales utilisées depuis des siècles et s’ouvrir à de nouveaux horizons.
Les légumes et les fruits sont des êtres vivants, plus nous les aidons, plus nous les rendons fainéants. De plus, lorsqu’on donne à boire à un légume, le goût s’en trouve dilué. Comme pour beaucoup de choses, il vaut mieux privilégier la qualité à la quantité !
Un sol vivant et bien équilibré est la condition sine qua none pour une résilience maximale.