Entretien avec Jean-Baptiste Cavalier, Animateur Coordinateur national du RENETA, Réseau National des Espaces-Test Agricoles. Jean-Baptiste explique l’activité et le mode de fonctionnement de l’association.
Bonjour Jean-Baptiste, pourriez-vous décrire en quelques mots l’activité du Reneta ?
Le Reneta est un réseau d’échanges de pratiques et d’expériences qui regroupe des espaces-test agricoles. L’association a plusieurs objectifs :
- faciliter les échanges entre espaces-test
- trouver des solutions aux problématiques que ces dispositifs rencontrent
- faire connaître le test d’activité en agriculture et les espaces-test agricoles
- favoriser le développement de nouveaux espaces-test
Pourriez-vous expliquer ce qu’est un espace-test et à qui il s’adresse ?
Un espace-test agricole est un dispositif multi-acteurs qui va proposer les conditions nécessaires à la mise en place de tests d’activité agricole. L’idée du test d’activité est de permettre à une personne qui veut s’installer comme agriculteur de tester son projet d’installation en grandeur réelle, en toute autonomie et dans un cadre qui va limiter la prise de risques. L’objectif est pour la personne de tester son projet pour décider si elle souhaite effectivement s’installer ou bien éventuellement si elle préfère le revoir, l’adapter ou tout simplement décider de ne pas s’installer. Cette personne va tester à la fois les aspects techniques de son projet, la viabilité économique et la « vivabilité », c’est à dire répondre à la question : « suis-je prêt à devenir agriculteur avec tout ce que cela impose : le rythme de vie, le lieu de vie, …. ? ».
Combien de personnes sont aujourd’hui en test ?
Ce ne sont que des estimations, mais il y a entre 300 et 350 personnes actuellement en test. Le réseau compte une cinquantaine d’espaces-test qui fonctionnent sur tout le territoire.
Quel est le profil des personnes qui souhaitent réaliser un test ?
Ce sont plutôt des gens non issus du milieu agricole, et qui ont souvent eu une première « vie professionnelle ». Ils ont en moyenne entre 30 et 40 ans, mais certains se lancent dans un test d’activité après leurs études, tandis que d’’autres arrivent à plus de 50 ans. Les enfants d’agriculteurs sont moins nombreux car ils ont la possibilité de tester leur appétence pour le métier directement dans la ferme de leurs parents. Il arrive toutefois que nous en ayons, et ce sont en général des enfants qui ont des projets différents de ceux de leurs parents.
Le Reneta a-t-il une dimension publique ?
Le réseau en tant que tel est une association loi 1901 mais les 80 membres sont tous des dispositifs autonomes. Nous sommes un réseau, et non une fédération. Chaque espace-test est complètement indépendant. Certains ont été mis en place par des institutions publiques (collectivités, établissements d’enseignement agricole…) généralement en lien avec des structures privées (associations de développement agricole, coopératives d’activité…). Parmi nos membres, il y a donc du public et du privé, les espaces-test étant souvent issus de partenariats public/privé.
Y a-t-il des critères d’entrée pour intégrer un espace-test ?
Il y a des critères d’entrée qui sont mis en place par chaque espace-test. De façon générale, il faut un minimum d’expériences et de formalisation du projet. L’espace-test est la dernière étape avant de s’installer, il s’inscrit dans un parcours plus global d’accompagnement à l’installation, depuis l’émergence du projet jusqu’à la post-installation. Mais ce n’est pas une étape « obligatoire » ! Beaucoup de gens décident de s’installer et ne passeront pas par un espace-test. Certains espaces-tests exigent que les personnes aient un niveau de formation de base qui donne la capacité agricole. Pour d’autres, ce qui est important est plutôt l’expérience, la motivation, et si le projet semble viable ou pas. L’idée est vraiment que la personne puisse exercer en complète autonomie. Elle n’est pas réellement installée mais elle se trouve dans la même situation qu’un véritable agriculteur ou agricultrice. Il y a un accompagnement technique, entrepreneurial, etc…, mais il y a aussi cette logique d’autonomie.
Combien de temps durent les tests ?
Le test d’activité se fait le plus souvent en mobilisant le statut « CAPE » (Contrat d’Appui aux Projets d’Entreprise) qui a été créé spécifiquement pour ça. Il s’agit d’une contrat d’un an renouvelable 2 fois (donc 3 ans au maximum). L’idée est de se tester sur au moins une saison d’agriculture. Et la durée moyenne du test est plutôt de 2 ans.
La base est donc d’avoir un projet d’installation. Ensuite, quel que soit l’espace-test, il faut prendre en compte les places disponibles. L’espace-test met à disposition un cadre légal d’exercice du test (le contrat CAPE), des moyens de production (fonciers, matériel, …) et un dispositif d’accompagnement et de suivi. Aujourd’hui, beaucoup de projets portent sur du maraichage car les personnes non issues du milieu agricole se destinent plutôt à ce type d’agriculture qui peut se faire sur des surfaces relativement petite, et où il y a moins d’investissements initiaux. Mais cela peut-être aussi des tests sur de l’élevage (apiculture, ovin, bovin, porcin…), de la viticulture, des grandes cultures, etc. Il y a le projet d’installation que la personne veut tester, mais il faut que cela convienne avec ce que l’on peut effectivement proposer. Nous proposons souvent du Bio même si ce n’est pas une obligation. Nous défendons plutôt une agriculture respectueuse de l’Homme et de l’environnement. Par ailleurs les gens qui s’installent sont plutôt sur des circuits courts.
La personne en test récupère-t-elle les revenus issus de sa production ?
Pendant la période de test, la personne va avoir ses charges (semences, fonciers, charges liées à l’utilisation du matériel, …). L’objectif est d’être le plus proche possible de la réalité. Ce qu’elle vend va générer des revenus pour son activité. A partir de là elle décide de se rémunérer ou pas. L’intérêt du contrat CAPE est que tant que les personnes en test ne se versent pas de revenus, elles peuvent toujours recevoir des revenus sociaux (RSA, chômage, …). La personne est responsable de son activité, même si elle n’a pas de numéro de SIRET en propre. Une comptabilité analytique gérée par l’espace-test permet de connaître précisément les chiffres de chaque porteur de projet.
Quel est votre parcours à vous plus particulièrement ?
Je suis ingénieur agro. J’ai plutôt un parcours dans le développement agricole à l’international. J’étais basé en France avec des projets un peu partout dans le monde (Afrique, Asie et Amérique latine). Cela m’intéressait de me lancer dans quelque chose de nouveau et j’ai donc décidé de travailler pour le Reneta.
Le réseau a été créé en mars 2012, et ils ont décidé d’embaucher un animateur coordinateur national en octobre de la même année.
Un mot peut-être pour conclure : existe-t-il d’autres réseaux qui fonctionnent sur le même modèle que le Reneta ?
Sur le test d’activité agricole il n’y a pas d’autres réseaux en France. Mais il commence à y avoir des choses qui se développent ailleurs en Europe (Espagne, Royaume-Uni…), et nous travaillons avec les acteurs impliqués dans ces projets.