Echange avec Jean-Luc, fondateur de Tell-Elevage
Bonjour Jean-Luc, comment est née l’idée de Tell-Elevage ?
J’ai 30 ans d’expérience dans le domaine de l’équipement et des bâtiments d’élevage. Cela concerne par exemple les équipements d’alimentation, les systèmes de ventilation, etc. On appelle ce domaine « l’élevage hors-sol ». Cette expérience, je l’ai acquise au sein d’un même Groupe où j’ai démarré comme électricien, puis exercé différents postes avant de devenir Directeur Général, fonction que j’ai occupée pendant 10 ans.
Ce qu’il s’est passé c’est que fin 2016, je n’étais plus en accord avec le Président du Groupe et j’ai donc décidé de quitter la boite. A ce moment là j’ai fait 2 constats importants qui m’ont mené à l’idée de créer Tell-Elevage :
- De plus en plus de gens partent à la retraite avec leur expertise. Les entreprises embauchent des jeunes avec l’idée de réaliser un transfert de compétences. Mais en pratique les gens partent à la retraite et le transfert de compétences n’a pas été fait. Une solution existe aujourd’hui pour résoudre ce problème : numériser toute cette expertise afin qu’elle ne quitte plus l’entreprise.
- Les bureaux d’études aujourd’hui sortent des produits qui sont vendus sur le terrain par des réseaux de vendeurs, de grossistes, etc. Entre le moment où le produit est conçu en bureau d’études et le moment où il est vendu puis utilisé, il y a une énorme déperdition d’informations. Les produits sont ainsi plus ou moins bien installés, utilisés, entretenus, etc. Quand il y a un problème et que l’on met autour d’une même table tous les acteurs ayant participé aux étapes de mise sur le marché des produits, ce n’est jamais la faute de personnes. Dans le domaine de l’élevage, on parle de l’outil de production et si l’outil de production ne fonctionne pas cela peut avoir des conséquences économiques catastrophiques pour les éleveurs.
Ce sont ces deux constats, dont je pense qu’ils sont valables dans de nombreux secteurs d’activités, qui m’ont poussé à créer Tell-Elevage.
Concrètement, quel est l’objectif de Tell-Elevage ?
Notre démarche consiste à auditer des bâtiments d’élevage en mesurant à peu près tout ce qu’il s’y trouve : les réglages, les niveaux d’humidité, les vitesses d’air, les courbes de débit, les niveaux de lumière, les consommations, etc. Le but est de réaliser un état des lieux complet de façon à déterminer si le système est utilisé de façon optimale ou pas, et s’il est conforme ou pas.
Pour cela, nous avons développé un système d’information. Nous sommes partis de zéro, nous avons tout fait nous même. J’en suis à 350 jours de développement aujourd’hui. Le but est de concevoir des tablettes déconnectées, c’est à dire qui fonctionnent même s’il n’y a pas internet dans les bâtiments d’élevage. Sur ces tablettes, la personne qui va auditer retrouvera un ensemble de questions qui correspondent à des exigences. Là elle y répond : est-ce que tel ou tel système est conforme ou pas ? Pour chaque non-conformité, l’auditeur va ensuite indiquer un niveau de criticité :
-
Minime : la non conformité a avec peu d’impact sur le résultat technico-économique
-
Majeure : la non conformité a un impact non-négligeable sur le résultat technico-économique
-
Critique : il s’agit d’une non conformité avec la norme et/ou d’un sérieux impact sur le résultat technico-économique)
Une fois que ce classement est fait, nous déterminons le plan d’actions : l’éleveur peut il lever la non-conformité tout de suite sans faire sortir ses animaux ? faut-il que les animaux ne soient plus dans l’élevage ? ou bien peut-être faut-il qu’il fasse intervenir une personne extérieure ?
Pour chaque question il est possible d’y incorporer une photo et un commentaire. Dans chaque audit on peut se retrouver avec plusieurs dizaines ou centaines de questions. Le but est de tout vérifier de A à Z. Nous classons enfin les questions dans des familles : problème matériel, problème d’installation, de mise en route, d’utilisation, d’entretien, etc.
Une fois ce travail réalisé dans l’exploitation, l’auditeur va pouvoir synchroniser sa tablette avec internet. Cela peut être fait tout de suite ou 5 jours après. La synchronisation s’effectue avec le back office. L’éleveur reçoit alors immédiatement un email avec un rapport généré automatiquement. Il peut alors sortir son rapport s’il le veut sur papier ou bien le garder en numérique et cliquer sur les non-conformités identifiés pour être mené vers une page de ressources. Ces ressources sont des explications. Il y a 2 types d’explications : pourquoi et comment. Les ressources de type « pourquoi » explique les raisons qui font que la non-conformité soulève un problème sur le résultat économique de l’exploitation. Les ressources de type « comment » listent les moyens existants pour lever la non-conformité. Les ressources sont composés de vidéos, de photos, de textes, … Pour accéder à l’ensemble de ces ressources, l’éleveur dispose d’un système d’abonnement.
Quel est votre modèle économique ?
Aujourd’hui je monte un réseau de franchise. L’idée est de former en France et à l’étranger des franchisés qui vont utiliser le système informatique, les ressources et la marque Tell-Elevage. Les franchisés paient un droit d’entrée et ils reversent ensuite un pourcentage de leur chiffre d’affaires à la franchise.
Les audits sont facturés directement par les franchisés et l’abonnement aux ressources est facturé directement par la franchise qui rétribue une partie aux franchisés.
En réalité, Tell-Elevage est composé de plusieurs structures : une structure qui s’occupe de toute la partie développement, une autre qui travaille sur les outils de formation (ressources liées au non-conformité et formation des franchisés) et enfin la franchise en soit pour le lien avec avec les franchisés.
Quel est l’origine du nom Tell-Elevage ?
Le terme « Tell » indique que l’on dit les choses, que l’on mesure des données de façon factuelles. Le terme « Elevage » désigne le domaine dans lequel nous travaillons. Mais aujourd’hui je suis contacté par de nombreuses sociétés qui sont intéressées pour transposer le modèle Tell-Elevage dans d’autres domaines. Il pourrait y avoir demain de nouveaux « Tell-xxx » dans d’autres secteurs d’activité.
Quel profil recherchez-vous pour vos franchisés ?
Au début je ne savais pas quel profil prendre. J’en ai vu 37 et n’en ai validé que 5 pour le moment. Ce sont tous des gens dans la profession. Il est beaucoup plus facile de former des gens à l’audit et aux outils informatiques qu’au métier d’éleveur. Dans le sens inverse c’est beaucoup plus cimpliqué.
Comment trouvez-vous vos franchisés ?
Les 37 candidats que j’ai rencontrés ont vus des articles dans les journaux ou bien nous ont trouvé sur les réseaux sociaux. Nous sommes sur tous les réseaux sociaux : Facebook, Instagram, LinkedIn, …
Je ne vais pas en revanche au Salon de la franchise. On y trouve toute sorte de candidat pour être franchisé mai très peu ont déjà vu un cochon !
Quelle est votre vision de l’élevage en France ?
Il y a de tout . Il y a des éleveurs qui aujourd’hui ont du mal. Les cours ne sont pas aujourd’hui à la hauteur de ce qu’ils méritent pour leur travail. Ils investissent des milliers d’euros et en retour les produits ne sont pas vendus aux prix qu’ils méritent.
A côte de ça il y a la possibilité d’améliorer l’élevage. Il y a des élevages qui ne sont pas toujours bien réglés, utilisés. Si l’éleveur met en application tout ce qu’on lui dit, ça va améliorer sa production, le bien-être animal, la qualité de travail pour les salariés, …. Tout le monde a y à gagner !
Quelles sont vos perspectives pour la suite ?
Cela fait un an que ça a commencé et l’activité prend. J’ai commencé à faire du commerce et à le montrer aux gens. Tous les gens qui font des audits aujourd’hui font ça avec des tableaurs Excel. Je peux remonter les non-conformités de tous les éleveurs uniquement au format numérique.
L’idée c’est de pouvoir entrer 3 auditeurs franchisés tous les 2 mois, puis de mettre en place toute la partie qui va être à renseigner, les ressources, la partie formation, etc. Normalement d’ici la fin de l’année je vais essayer de m’occuper de l’export. Pour l’instant j’ai dit que la 1ère année je voulais valider le système en France.